Las Nuevas Estrellas de la Riviera
La pianiste cubaine a été nominée plusieurs fois au « Cubadisco Internacional », l’équivalent du « Midem » pour le marché international de la musique latine, mais dans le pays dans lequel elle vit depuis plus de dix ans rien de tout cela. Pourquoi Janysett McPherson ne capte-t-elle pas encore les radars hexagonaux menant au succès. Nous vous proposons de découvrir à travers cette présentation celle qui sur scène se fait accompagner par Michel Alibo, Andy Narell, Rafael Paseiro, Minino Garay, Jean-Marc Jafet, pas n’importe qui vous en conviendrez, mais aussi Hadrien Feraud, Olivier Louvel, Nicolas Viccaro Pierre Bertrand, et Dominique Viccaro son compagnon dans la vie.

Actuellement vous effectuez de nombreuses tournées aux Antilles, dans les Caraïbes. Est-ce un retour aux sources, la traduction d’un besoin ?
Disons que je suis une fille qui vient des Caraïbes, ça fait partie de mon identité, Retourner aux Antilles c’est en quelque sorte une manière d’explorer la musique de cette région. Je viens d’arriver de Trinidad et Tobago au festival Jazz Artists on the Green, qui met en avant les artistes caribéens. C’est un véritable plaisir d’échanger avec les musiciens de là-bas.
Vous avez commencé à Cuba à jouer n’est ce pas ?
Oui, j’ai commencé très petite. A cinq ans, je chantais et mon père m’accompagnait à la guitare dans des petits spectacles de crèches. Ensuite, j’ai effectué le parcours classique au conservatoire, l’école nationale de musique de la Havane et les premiers échanges professionnels avec des artistes qu’ils soient confirmés ou en devenir. J’ai effectué une rencontre cruciale dans ma vie en tant que musicienne, c’est celle avec Alain Perez.

On s’est connus à l’école nationale d’art. Il était guitariste et il est devenu celui de Chucho Valdes. Son parcours l’a amené à devenir le bassiste attitré de Paco de Lucia. Il a signé de nombreuses collaborations à Cuba et aux USA. Je faisais partie de son groupe et j’ai beaucoup appris avec lui sur la scène et les rencontres se sont enchainées avec l’Orquestra Anacaona de Cesar « Pupy » Pedros, dans le style populaire cubain, puis il y a eu Jérôme Savary sur « Le Bourgeois gentilhomme ».
« La pianistique cubaine est fondamentalement basée sur la russe »
Le piano est bien représenté à Cuba vous avez évoqué Chucho Valdez, mais il y a aussi Gonzalo Rubalcaba. Comment expliquez vous que le piano cubain ait aussi bien réussi au niveau international ?
Je pense que c’est dû à la formation dispensée dans les écoles à Cuba après le triomphe de la révolution cubaine et il y a eu un programme de scolarisation de toute la population. À l’époque Cuba avait conservé des relations diplomatiques avec l’ancienne URSS, mais il y a aussi eu, au début des années 60, une grande immigration des artistes russes et tchécoslovaques à Cuba. Beaucoup de professeurs de piano sont restés à Cuba. Donc la pianistique cubaine est fondamentalement basée sur la russe, c’est à dire cette régularité, cette technicité et cette virtuosité et je pense qu’on la doit en grande partie à l’école russe. On a eu des compositeurs cubains de la fin du XIXe siècle et du début du XXe comme Amadeo Roldan, Alejandro Garcia Latour, Ernesto Lecouna, qui ont tous influencé la culture pianistique. La culture cubaine est très mélangée au niveau du piano à la culture russe c’est ce qui fait que Cuba a donné de grands pianistes comme Chucho Valdes, Gonzalito Rubalcaba, Roberto Fonseca. Mais il y a aussi de grands trompettistes comme Arturo Sandoval, Mario Bauza, et les percussions cubaines qui sont reconnues dans le monde entier.

Comment êtes vous arrivée sur la Côte d’Azur ?
La vie a fait que j’ai posée mes valises à Monaco pour un contrat de deux ans avec la société SPM en tant que pianiste et directrice d’orchestre des grands spectacles au casino de Monte Carlo. A partir de là, j’ai commencé à connaître d’autres musiciens. Et lors de mon premier album en France (Tres Almas ) j’ai eu la chance de pouvoir collaborer avec Didier Lockwood, Nicolas Folmer, Adrien Féraud et la liste est longue. Mon premier disque a été nominé au marché international du disque latin de Cuba l’équivalent du MIDEM en France. Il y a eu aussi une Victoire de la musique avec une de mes compositions (prix de la meilleure interprétation et composition) et la collaboration avec José Luiz Cortes. Donc, la musique m’a amenée sur la Riviera française et aussi l’amour car j’ai rencontré Dominique Viccaro avec qui j’ai créé notre projet que nous défendons aujourd’hui. Et le voyage continu.
« Une relation très corporelle avec le piano«

Vous chantez aussi, est-ce que cela peut signifier que l’instrument ne suffit pas pour exprimer vos émotions ?
Pour moi les deux trouvent leur place ensemble. Le piano, c’est l’instrument que j’ai étudié de manière académique et j’ai une relation très corporelle avec cet instrument. Mais lorsque je chante et m’accompagne au piano c’est quelque chose qui me dépasse. Je me sens en connexion avec quelque chose d’imperceptible, que je ne peux pas expliquer avec des mots. Je prends une anecdote. Ainsi en 2017, on a fait le festival de jazz de Saint Jean Cap Ferrat et dans la même soirée il y avait le Didier Lockwood trio. Pour info, il était sur mon premier album et ça faisait un petit moment que je voulais jouer avec lui en concert et sur un nouveau projet d’album pour qu’il vienne en guest. Et l’opportunité s’est présentée à ce moment là. Il est venu jouer pendant mon concert avec son violon sur « Alby », une de mes compositions. Et ensuite pour son concert, il y avait Dédé Ceccarelli à la batterie, Thierry Eliez au piano et ils ont commencé à jouer « Over the Rainbow », un morceau que j’adore et il m’a invité. J’ai pris le micro et j’ai chanté et c’était un réel dialogue avec lui. C’est un des plus beaux souvenirs que je conserve de toute ma vie. Et je me suis sentie en étroite connexion avec Didier. Le piano et la voix c’est pour moi l’harmonie parfaite.
Donc quand vous chantez en étant au piano on peut dire que c’est Body and Soul ?
Disons que c’est une autre manière de ressentir l’âme, car lorsque je joue seulement du piano, je suis aussi en totale connexion avec lui. Ce sont des émotions et des sensations différentes mais qui ont elles aussi une importance cruciale. Et d’ailleurs je fais faire découvrir au public un nouvel aspect de ma pratique artistique. Je vais enregistrer à Rome seule avec mon piano pour explorer cette facette de ma musique.
Comment voyez-vous votre évolution musicale ?
C’est quelque chose que je sens, je voyage depuis que je suis arrivée en France. Les rencontres que je fais avec les artistes avec qui j’ai eu la chance de collaborer, constituent pour moi c’est un pas vers une nouvelle planète musicale. Mon évolution est continuelle.

Après votre projet de piano solo à Rome, avez-vous d’autres projets en vue ?
Dans l’immédiat c’est cet enregistrement au piano solo qui devrait sortir à la rentrée en septembre ou à l’automne. Et en parallèle j’ai un projet d’album avec de nouvelles compositions en espagnol, ma langue maternelle, mais aussi des grandes chansons du répertoire français arrangées avec des rythmes cubains et caribéens et ce toujours avec Dominique Viccaro à la batterie. Et puis, je vais voir où me mène la vie car parfois on planifie des projets, des choses et la vie décide à notre place. J’ajoute, je me produis avec des invités comme Stefano di Battista. Depuis deux ans, je fais des collaborations avec des artistes de renoms au cours de mes concerts comme Andy Narell, Mino Cinelu et Orlando « Maraca » Valle. Justement nous allons être le 27 juillet au festival de jazz de la Martinique avec Mino en guest, encore une fois les Caraïbes et le 28 on fait un saut en Guadeloupe avec Orlando (« Maraca » Valle). Il y a aussi une collaboration avec Andy Narell sur son quartet où nous allons faire une série de concerts au Cotton Club à Tokyo du 18 au 20 juillet. Et puis, l’an passé, festival de jazz de San Remo, j’ai eu Andy et Mino en invités pour mon concert. C’était formidable !
Enfin, que vous apporte Dominique Viccaro ?
On s’est rencontrés avec Dominique il y a quelques années, et ça a été la rencontre cruciale de ma vie car il m’a fait prendre conscience du niveau de mes connaissances et m’a ouvert à d’autres styles de musique. Depuis que nous travaillons ensemble, on compose notre répertoire en étroite collaboration et c’est aussi ce qui se passe pour le piano solo. C’est quelque chose de très fusionnel car nous avons composé presque la totalité de l’album ensemble. Pour moi, c’est un des plus beau travail de ma vie ! Avec lui, c’est plus qu’une rencontre professionnelle. L’amour nous a réuni. On a un petit jeune homme ensemble et j’espère que la vie continuera de nous guider sur ce chemin là.
Michel Maestracci
Photos : Courtesy ©Jean Louis Neveu
Prochains concerts :
29 juin : Jazz & Cheese Festival, Abries-France
4 juillet : Jazz des Cinq Continent, Marseille-France
16 juillet : Cotton Club, Tokyo-Japon
27 juillet : Jazz Night Fest, Fort de France-Martinique
24 août : Andorra Jazz Festival, Italie
30 novembre : Jazz à Fareins, Lyon-France
14 mars 2020 : Chorus Jazz Club, Lausanne-Suisse
Discographie :
Comme leader
2018 : Pino e a Capo (JD Music)
2014 : Blues Side Live (JD Music)
2011 : Tres Almas (Cristal Records)
Avec Anacaona :
2008 : No lo Puedo Evitar (Bis Music)
2000 :Lo Que Tu Esperabas (Luzafrica)
Votre commentaire